C’était en mars dernier. « Bon… Alors qui prendra la présidence dans les circonstances? » Silence. Aussi cliché soit-il de m’exprimer ainsi, je vous assure qu’on aurait pu entendre une mouche voler. Puis, huit paires d’yeux se sont tournés vers moi. Huit administrateurs, huit entrepreneurs d’expérience, compétents, qualifiés, huit personnes ont affirmé en coeur : « Ah et bien la voilà, notre nouvelle présidente de la Chambre de commerce. »
Dans ma tête, mes hamsters sont tombés en mode full spin. C’était à la fois un sauve-qui-peut et un aux-roulettes-camarades, mais dans tous les cas, on entrait en mode panique. Je suis peut-être folle, mais je suis tout de même certaine d’avoir entendu l’un d’eux crier : « imposteure! » Moi, présidente? Attendez un instant, il doit y avoir erreur sur la personne.
Il faut dire qu’on m’avait déjà fait le coup quelques mois auparavant. C’est que je suis un brin intense, dans ma vie perso comme dans mes implications. J’ouvre ici une parenthèse… N’étant pas une Gaspésienne pure laine, j’ai choisi à mon arrivée dans la région, il y a quelques années, de m’impliquer dans mon milieu pour mieux m’intégrer. Vous dire si je me suis bien intégrée!!! Certains cumulent les timbres chez IGA, ben moi, c’est les CA. Blague à part, ma région d’adoption, je l’aime, j’y crois!
Bref, en l’espace de six mois, je me suis retrouvée présidente de CA… deux fois! La première fois, c’était pour la Commission jeunesse Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine - une belle cause, par et pour les jeunes, du développement régional dans ce qu’il a de plus beau. Certes, ça m’a un peu stressé… Mais je me sentais tout de même confiante et compétente!
Dans le cas de la Chambre de commerce, je vivais une méga crise de l’imposteure. C’est que je ne suis pas entrepreneure… du moins, pas encore! Mais il faut croire qu’on a vu en moi les qualités et la drive d’une femme d’affaires. Puis, vient un moment où on doit laisser les doutes de côté et foncer. Au mieux, on réussira. Au pire, on se trompera, mais surtout on apprendra.
Il y a des jours où je me demande ce qui m’a pris d’accepter. Parce que les défis sont nombreux. L’organisation est en période de transition. Je me sens comme une fille qui, par amour infini pour son mec, aurait adopté son ado un brin rebelle, à la recherche de son identité et de sa voie! Mais je crois à tout son potentiel. Si j’ai choisi de rester en région, c’est parce que tout est à faire. Jamais, en ville, je n’aurais eu la chance (ou même l’envie) d’être autant impliquée. Encore moins d’être présidente de CA à 34 ans. Ici, je sais que j’ai un impact direct.
Il y en aura toujours pour dire que ce n’est pas ma place. Des quidams qui lancent, le ton méprisant : « Ben là, tu es même pas entrepreneure. » Ce à quoi je réponds maintenant : « Bon point, mon ami. Il y a un siège de libre au CA. Tu veux ma place? »
Engagez-vous! que disent les Romains dans Astérix. Impliquez-vous! vous dis-je. Non, ce n’est pas toujours rose. Ça gruge du temps, de l’énergie, ça demande du souffle. Ça nous expose aux critiques. Mais c’est franchement valorisant. Et dans un contexte où les gens peuvent être très cyniques et individualistes (surtout lorsqu’on sort d’une campagne électorale!), ça nous permet de faire avancer notre milieu, une heure de bénévolat à la fois.
Émilie Bourque-Bélanger