Parler – beaucoup et vite, rire de blagues inappropriés à des moments qui le sont tout autant, interrompre souvent, « faire compliqué quand on peut faire simple », raconter ses rêves tordus que personne d'autre ne semble faire ni comprendre, d’ailleurs.
Se sentir trop petite, trop grande, trop jeune, trop vieille. Aimer être avec les adultes, les observer sans jamais faire partie tout à fait du lot. Aimer être avec les plus jeunes afin de prendre soin d’eux sans vraiment appartenir. Anticiper les moments avec les personnes de son âge faute de savoir quoi dire, comment agir.
Se faire dire de se taire, de se calmer, d'être moins intense. Parce qu’on se fait reprocher d’être trop, tout le temps. Trop rapide, trop sensible, trop émotive, trop franche, trop « hyper », trop impatiente mais trop tolérante. Trop naïve, trop méfiante, trop perfectionniste, trop paresseuse.
Trop, tout le temps. Jamais juste « assez ». Et le « trop » d’hier est le « pas assez de demain ».
De deux à 26 ans, ces commentaires et cette réalité ont été mon pain quotidien. Une hyperactive qui s’ignore et surtout, qui est mécomprise de son entourage, ça fait des ravages. Sur l’estime de soi, parce que, forcément, on se fait sans cesse reprocher d’être. On tente de ne plus être trop ni pas assez, sans grand succès. On vit des échecs à répétition, donc. On essaie d’être ce qu’on n’est pas, d’éviter les commentaires désobligeants, de tendre vers une perfection inaccessible. Mais on n’y arrive pas. Jamais. Mais on continue d’essayer, d’un coup que. Parce qu’après tout, on aime ça « faire compliqué quand on peut faire simple ».
Avec le temps, on commence à s’accepter. A s’assumer, même. A aimer ça, être désordonnée, « loud », les émotions en montagnes russes. Et on commence à s’entourer de gens qui nous acceptent également ainsi. Puis, on va chez le médecin et le psychiatre. On se fait confirmer nos doutes des dernières années : trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH). On soupire de soulagement. Me semble bien, qu’on n’était pas fou, non plus.
Et on continue de côtoyer les gens qui apprécient notre lumière, notre authenticité parfois crue. Et on finit par gagner sa vie à rire, faire rire, parler, partager, divertir. Et on se dit qu’on a mauditement bien fait de s’écouter et d’être soi. Sans l’être trop ou pas assez.